vendredi , 6 novembre 2020
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Sebastian KURZ : Victoire en solitaire

Au sommet mais bien seul: Sebastian Kurz est parti lundi en quête de partenaires pour gouverner l’Autriche, fort d’une large victoire aux législatives mais privé du soutien de l’extrême droite, son ancien allié, et boudé par les autres formations. Son score de 37%, selon les projections, offre au chef des conservateurs une revanche appréciable, quatre mois après la chute de sa coalition avec le parti d’extrême droite FPÖ, balayé en mai par le scandale de corruption de l’Ibizagate. Mais Sebastian Kurz a beau améliorer de près de six points le résultat obtenu par son parti ÖVP en 2017, il ne peut gouverner seul. « Nous allons bien sûr discuter avec tous les partis (…) pour voir avec lesquels nous pouvons former un gouvernement stable », a-t-il promis lundi. Mais il ne se fait guère d’illusion: « je crains que ce soit cette fois plus compliqué » qu’il y a deux ans. Aucune percée avant la fin de l’année, voire le début 2020, n’est attendue par la plupart des commentateurs.

En fin de semaine, après la publication des résultats définitifs, l’ex-chancelier devrait être officiellement chargé par le président d’entamer des négociations.

« Chance à saisir »

Les autres partis ne sont pas pressés de lui tendre la main. Dès dimanche soir, l’extrême droite FPÖ, qui a gouverné dix-huit mois avec la droite, a fait savoir qu’elle se voyait siéger dans les rangs de l’opposition après un recul dans les urnes bien plus fort qu’attendu.

Confronté dans les derniers jours de campagne à de nouveaux soupçons de malversation, le parti anti-islam et anti-immigration a perdu environ dix points (16%) par rapport au précédent scrutin et n’est « pas en position » de gouverner, a annoncé son nouveau chef Norbert Hofer.

« Le FPÖ est le grand perdant » du scrutin, observe le politologue Peter Filzmaier, alors qu’il y a deux ans, la coalition autrichienne entre la droite et l’extrême droite s’affichait en modèle à suivre dans une Europe aux prises avec la montée des nationalismes.

Portés par la mobilisation internationale sur le climat, les Verts d’Autriche sont les gagnants manifestes des législatives, avec un score de 14% qui les place en position de gouverner aux côtés de Sebastian Kurz.

« Avancez et faites-vous confiance ! » lançait lundi le quotidien conservateur Die Presse, appelant les deux partenaires potentiels à saisir « leur chance » pour former une coalition pionnière sur la scène européenne.

Mais le parti écologiste ne compte pas faire de cadeau au chef des conservateurs, qui a imposé une ligne dure sur l’immigration et refuse mordicus la création d’une taxe carbone défendue par les Verts.

Le chef des « Grünen », Werner Kogler, a averti qu’il n’envisageait un pacte avec Sebastian Kurz que si ce dernier opérait « un changement politique radical ».

Il a déclaré lundi vouloir d’abord sonder les conservateurs sur leurs intentions avant toute négociation sur le fond.

Surfer la « vague verte »

Les questions climatiques ont éclipsé la thématique de l’immigration durant la campagne électorale et les écologistes ont quadruplé leur score (14%), eux qui n’avaient pas franchi la barre des 4% nécessaires pour entrer au parlement en 2017.

« Ce pourrait être l’occasion pour Sebastian Kurz de prendre le train de l’écologie en marche tout en neutralisant la vague verte », avance le politologue Thibault Muzergues.

Mais il pourrait tout aussi bien revenir à la traditionnelle « grande coalition » avec les sociaux-démocrates du SPÖ, arrivés en seconde position (22%) avec un retard de quinze points sur la droite. Ils réalisent leur performance la plus médiocre de l’après-guerre.

Las, eux non plus ne se montrent pas particulièrement enthousiastes à l’idée de partager le pouvoir avec la droite, qu’ils accusent d’une dérive populiste sous l’influence de Sebastian Kurz.

Reste l’option d’un gouvernement minoritaire. Au vu des résultats, cette variante « est devenue très, très tentante », estime l’analyste Johannes Huber. « Bien sûr, à un moment donné, il y aura une motion de défiance contre M. Kurz et finalement de nouvelles élections ».

Las, eux non plus ne se montrent pas particulièrement enthousiastes à l’idée de partager le pouvoir avec la droite, qu’ils accusent d’une dérive populiste sous l’influence de Sebastian Kurz.

« Sebastian Kurz décevra ses électeurs quelque soit la coalition qu’il va former », résume le politologue Peter Filzmaier.

Reste l’option d’un gouvernement minoritaire. Au vu des résultats, cette variante « est devenue très, très tentante », estime l’analyste Johannes Huber. « Bien sûr, à un moment donné, il y aura une motion de défiance contre M. Kurz et finalement de nouvelles élections ».

« L’Autriche a besoin d’un gouvernement stable », plaidait au contraire lundi le quotidien Der Standard (centre gauche), voyant dans les négociations à venir une nouvelle « épreuve de vérité » pour le dirigeant trentenaire.

EXTRÊME DROITE SANCTIONNÉE

Le jeune leader conservateur Sebastian Kurz, 33 ans, a remporté les élections législatives autrichiennes dimanche, selon les projections, signant son probable retour à la chancellerie, dans un paysage politique bouleversé par la débâcle de l’extrême droite et le retour fracassant des Verts.

Quatre mois après avoir été renversé par le retentissant scandale de l’Ibizagate, M. Kurz a réussi son pari : son parti conservateur obtient environ 37% des suffrages, améliorant même son score de 2017 de presque six points, selon les projections de la télévision publique ORF.

Son premier gouvernement, formé en 2017 avec le parti d’extrême droite FPÖ, n’avait pas résisté à des révélations compromettantes pour le chef du FPÖ et numéro deux du gouvernement. Il avait implosé en mai, au bout de 18 mois de mandat, entraînant la tenue de ces élections anticipées.

Les Autrichiens ont sanctionné le FPÖ pour ce scandale qui a terni l’image de leur pays: le parti nationaliste perdrait environ dix points par rapport au scrutin de 2017, à environ 16%. Il arrive derrière les sociaux-démocrates qui prennent la seconde place avec environ 22% des voix.

Dans une campagne où les enjeux climatiques ont remplacé la question migratoire qui avait dominé les législatives de 2017, les Verts enregistrent une progression fulgurante: sortis du parlement avec moins de 4% des voix il y a deux ans, ils y font leur retour, avec entre 13 et 14% des suffrages selon les projections.

Le parti libéral NEOS est la cinquième formation à intégrer le nouveau parlement à quelque 7% des suffrages.

L’ex-chancelier Kurz s’expose maintenant à des négociations ardues dans sa quête d’alliés pour gouverner.

Selon les projections, M. Kurz aurait la possibilité arithmétique de former une coalition avec les sociaux-démocrates, avec l’extrême droite ou les Verts, trois options qui s’annoncent périlleuses pour le jeune dirigeant qui a promis aux Autrichiens le retour de la stabilité.

Tout au long de la campagne électorale, l’ex-chancelier s’est gardé d’exprimer sa préférence pour conserver le maximum de marge de manoeuvre.

Du bleu au Vert ?

Plusieurs figures influentes de l’ÖVP font pression en coulisse pour qu’il étudie sérieusement un retour à la sage alliance avec la gauche, une formule ayant gouverné l’Autriche durant 44 ans depuis la fin de la Seconde guerre mondiale.

Mais l’ex-chancelier sait qu’il perdrait en popularité chez des électeurs qui ne veulent plus entendre parler de ce « vieux couple » usé par les désaccords et les inimitiés personnelles.

Les « bleus », couleur du FPÖ, essuient un vote-sanction pour le chaos provoqué par le scandale de l’Ibizagate, une affaire à laquelle se sont ajoutés, dans les derniers jours de la campagne, des soupçons de détournements de fonds au sein du parti.

Les efforts de son nouveau chef, Norbert Hofer, pour faire oublier les frasques de son prédécesseur, Heinz-Christian Strache, n’ont pas payé et la formation d’extrême droite paraît en mauvaise position pour proposer une nouvelle alliance aux conservateurs.

Les dirigeants de droite et d’extrême droite s’affichaient volontiers comme un modèle de coalition duplicable à l’échelle de l’Union européenne, où les partis nationalistes ont multiplié les succès électoraux ces dernières années.

M. Strache avait dû démissionner de tous ses mandats après la diffusion d’une vidéo tournée en caméra cachée à Ibiza révélant des discussions compromettantes: à une femme se présentant comme la nièce d’un oligarque russe, il expliquait comment financer le FPÖ de façon occulte.

Les allégations de détournements de fonds sur lesquelles la justice enquête visent aussi M. Strache, soupçonné d’avoir utilisé l’argent du parti pour couvrir des dépenses personnelles.

Les sujets climatiques ayant éclipsé la thématique de l’immigration lors de la campagne électorale, M. Kurz a entamé un rapprochement sur un programme gouvernemental commun avec les Verts.

Ces derniers gouvernent déjà plusieurs régions avec les conservateurs et envisagent de participer pour la première fois à un gouvernement fédéral. Mais les concessions de part et d’autre devraient être si nombreuses, sur l’environnement et l’immigration notamment, que ce scénario laisse beaucoup d’observateurs sceptiques.

(avec Afp)

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