Le tireur radicalisé et au lourd passé judiciaire qui a fait trois morts et 13 blessés mardi soir à Strasbourg, est toujours en fuite mercredi, traqué dans une ville sous le choc après cette attaque contre son marché de Noël. Pour des raisons de sécurité, le marché de Noël, qui attire chaque année deux millions de touristes, est fermé au moins pour la journée, les manifestations culturelles sont annulées et les cours dans les écoles maternelle et primaires suspendus.
À midi, le grand glas de la cathédrale de Strasbourg a sonné durant 10 minutes « pour s’unir à la souffrance des victimes et de tous les Strasbourgeois », selon l’évêché. Le Parlement européen, qui siège cette semaine à Strasbourg, a également observé une minute de silence.
Toujours en fuite, l’agresseur, âgé de 29 ans, né à Strasbourg et fiché « S » (pour Sûreté de l’État) pour radicalisation islamiste, a ouvert le feu mardi peu avant 20H00 en trois points du centre historique de Strasbourg dans des rues commerçantes, à quelques mètres du grand sapin emblématique du célèbre marché de Noël de la ville.
« Certains ont eu une balle dans la tête », a précisé le maire de Strasbourg Roland Ries, sur BFMTV. Selon lui, les victimes sont principalement des hommes.
L’assaillant a échangé des tirs avec les forces de l’ordre qui l’ont blessé puis il est parvenu à prendre la fuite.
« Ça s’est passé vers 20H00 alors qu’un groupe de Sentinelle en patrouille, alerté par les tirs, s’est dirigé en direction de la place Kléber (au centre-ville de Strasbourg, NDLR) et est tombé dans une rue adjacente nez à nez ou presque avec l’assaillant », a raconté le porte-parole de l’état-major des armées, le colonel Patrik Steiger. « Pris à partie par l’assaillant, les deux soldats de tête ont riposté, ce qui a provoqué sa fuite ».
Place Kléber, des passants ont commencé à rendre hommage aux victimes par des inscriptions « je suis Strasbourg » et quelques bougies et pétales de roses.
De sources proches de l’enquête, 420 policiers et 200 gendarmes, dont des éléments du GIGN, sont mobilisés pour tenter de le retrouver. Il « ne peut être exclu » que le fuyard soit passé en Allemagne, a indiqué le secrétaire d’Etat à l’Intérieur Laurent Nuñez, ajoutant qu’un « bouclage des frontières a été assuré », ainsi « qu’un bouclage périmétrique autour de la ville de Strasbourg ».
Le parquet de Paris a ouvert une enquête pour « assassinats, tentatives d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste et association de malfaiteurs terroriste criminelle ». « La motivation terroriste n’est pas encore établie », a toutefois estimé mercredi matin M. Nuñez.
« Plusieurs séjours en prison »
L’assaillant est « un individu connu (pour des faits de) droit commun pour beaucoup de délits autres que liés au terrorisme, il n’a même jamais été connu pour des délits liés au terrorisme », a indiqué M. Nuñez.
« Il a fait plusieurs séjours en prison et c’est à l’occasion de ces séjours qu’a été détectée une radicalisation mais dans la pratique religieuse, jamais de signe de passage à l’acte », a précisé le secrétaire d’Etat.
Selon la garde des Sceaux Nicole Belloubet, l’assaillant avait « effectué en France deux peines de prison de deux ans chacune qu’il avait purgées. Il est sorti (de prison) il y a trois ans de sa dernière condamnation », et a « également été condamné en Allemagne et en Suisse ».
Le mardi matin, il devait être interpellé mardi matin par les gendarmes dans le cadre d’une enquête de droit commun mais a échappé à cette arrestation, selon une source proche du dossier.
Des opérations de police ont également eu lieu mardi soir dans le quartier du Neudorf, au sud du centre-ville.
Urgence attentat
Le centre-ville de Strasbourg, qui avait été bouclé et évacué jusqu’à 02H00 du matin, était quasi désert mercredi matin, tous les chalets en bois du marché de Noël étant fermés pour la journée.
« On a eu la boule au ventre en partant (travailler ce matin) parce qu’on fait le centre-ville. On ne sait pas comment ça va se passer », s’inquiétait Cathia, livreuse habitant à Erstein, au sud de Strasbourg, présente dans une des rues ensanglantées la veille.
Au pied du grand sapin, resté illuminé toute la nuit, Antoine, étudiant en médecine de 20 ans, avait « du mal à croire que c’est arrivé ici ».
« On n’arrive pas à coller l’idée d’une telle violence à côté de lieux qu’on fréquente tous les jours. On a du mal à imaginer l’après, car on a jamais vécu ça. C’est une première fois à Strasbourg, une ville assez paisible ».
Peter Fritz, un journaliste autrichien qui couvrait la session du parlement européen à Strasbourg, s’est lui retrouvé au milieu de la fusillade.
« Quand je suis arrivée au coin de la rue, j’ai compris que c’était des coups de feu et un homme était au sol avec une blessure par arme visible à la tête », a-t-il raconté sur la chaîne ORF.
« Avec une autre personne, nous avons tenté de lui apporter de l’aide, nous l’avons transporté dans un restaurant. Avec deux professionnels de santé allemands, nous avons essayé de lui faire des massages cardiques mais après 45 minutes, il était clair, et un médecin nous l’a dit par téléphone, que ça ne servait plus à rien ».
Le journaliste dit avoir échangé quelques mots avec la femme de la victime « sous le choc » qui lui a expliqué qu’ils étaient touristes originaires de Thaïlande.
Le gouvernement a porté le niveau du plan Vigipirate à « urgence attentat », le plus haut niveau du plan Vigipirate, permettant notamment aux autorités « la mobilisation exceptionnelle de moyens ».
La France vit sous une menace terroriste élevée depuis la vague d’attentats jihadistes sans précédent qui a fait 246 tués depuis 2015. Cette année, deux attaques avaient déjà frappé le pays: l’une au couteau le 12 mai à Paris, faisant un mort et dont l’auteur, Khamzat Azimov, avait grandi à Strasbourg. Le 23 mars, à Carcassonne et à Trèbes (Aude) Radouane Lakdim avait tué quatre personnes.
LA PRÉFECTURE CORRIGE LE BILAN
Le bilan de l’attaque sur le marché de Noël de Strasbourg mardi soir a une nouvelle fois été corrigé mercredi matin par la préfecture du Bas-Rhin, qui fait de nouveau état de trois personnes décédées et treize blessées.
Aucune explication n’a été avancée pour motiver cette révision des chiffres. Le maire de la ville, Roland Ries, avait fait état d’un bilan plus lourd de quatre morts dans le courant de la nuit avant que le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner n’avance un bilan de trois morts lors d’une conférence de presse à 02H00 du matin.
L’auteur de la fusillade, un homme âgé de 29 ans et fiché « S » (pour Sûreté de l’Etat) pour radicalisation islamiste, est toujours en fuite. Il est activement recherché par les forces de l’ordre: 4,5 unités mobiles sont mobilisées sur le terrain, appuyées par des moyens aériens et par les équipes du Raid, de la Brigade de recherche et d’intervention et de la force Sentinelle, a rappelé la préfecture.
De sources proches de l’enquête, 420 policiers et 200 gendarmes sont mobilisés.
L’assaillant, qui a déjà effectué plusieurs séjours en prison pour des délits de droit commun, a échangé des coups de feu avec les forces de sécurité mais est parvenu à s’enfuir.
Le porte-parole de l’état-major des armées, le colonel Patrik Steiger, est revenu sur ce qu’il avait dit hier soir, affirmant qu’il avait pas eu de militaire blessé lors de ces échanges de tirs. Seule « une arme a été endommagée par les tirs de l’assaillant », a-t-il indiqué à l’AFP.
« Ça s’est passé vers 20H00 alors qu’un groupe de Sentinelle en patrouille, alerté par les tirs, s’est dirigé en direction de la place Kléber (au centre-ville de Strasbour, NDLR) et est tombé dans une rue adjacente nez à nez ou presque avec l’assaillant », a raconté M. Steiger. « Pris à partie par l’assaillant, les deux soldats de tête ont riposté, ce qui a provoqué sa fuite ».
Le centre de Strasbourg a été bouclé une grande partie de la nuit mais les mesures de confinement ont été levées vers 02H30 du matin. Toutes les manifestations sont interdites dans la capitale alsacienne mercredi.
LE TIREUR EN FUITE TRAQUÉ
Plusieurs centaines de membres forces de sécurité étaient mobilisées dans la nuit de mardi à mercredi pour tenter de retrouver l’auteur en fuite de la fusillade qui a fait au moins trois morts mardi soir sur le Marché de Noël de Strasbourg, alors que le gouvernement décidait de placer la France en « urgence attentat ».
Quelque 350 personnes, dont 100 membres de la police judiciaire, des militaires et deux hélicoptères, sont aux trousses de l’assaillant, a indiqué le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner lors d’une déclaration depuis la préfecture du Bas-Rhin à Strasbourg, où il a été dépêché par le président Emmanuel Macron.
Mardi soir, « à partir de 19h50 », le tireur a ouvert le feu et « semé la terreur » en « trois points » de Strasbourg, a déclaré M. Castaner sans dévoiler son identité.
Il a tué trois personnes et en a blessé 12, dont six sont en urgence absolue, selon le ministre. De son côté, la préfecture du Bas-Rhin a fait part dans la nuit d’un bilan provisoire de trois personnes décédées, 5 blessées graves et 6 blessées légers. Dans la soirée, le maire de Strasbourg Roland Ries avait évoqué auprès de l’AFP un bilan de « quatre morts et une dizaine de blessés dont trois ou quatre dont le pronostic vital peut être engagé ».
« Entre 20h20 et 21h », l’assaillant a par deux fois échangé des coups de feu avec les forces de sécurité avant de s’enfuir, a encore expliqué Christophe Castaner.
Lors de ces échanges de tirs, l’assaillant a été blessé par une patrouille de soldats de l’opération Sentinelle qui sécurisent le Marché de Noël de Strasbourg, a expliqué une source policière. Selon l’état-major des armées, un soldat a été blessé légèrement à la main par ricochet d’un tir de l’assaillant.
« On a entendu plusieurs coups de feu, trois peut-être, et on a vu plusieurs personnes courir. L’une d’elles est tombée, je ne sais pas si c’est parce qu’elle a trébuché ou parce qu’elle a été touchée. Les gens du bar ont crié +ferme, ferme+ et le bar a été fermé », a raconté un témoin joint par l’AFP et confiné dans son appartement.
M. Castaner a précisé que l’individu était « très défavorablement connu pour des faits de droit commun, pour lesquels il a déjà fait l’objet de condamnations en France et en Allemagne et pour lesquels il a purgé ses peines ».
Selon une source proche du dossier, le suspect, un homme de 29 ans fiché « S », devait être interpellé mardi matin par les gendarmes dans une enquête de droit commun.
Le parquet de Paris a ouvert une enquête pour « assassinats, tentatives d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste et association de malfaiteurs terroriste criminelle ».
Après cette attaque le gouvernement a porté le niveau du plan Vigipirate à « urgence attentat », a annoncé le ministre de l’Intérieur.
Cette mesure comprend « la mise en place de contrôles renforcés aux frontières, et des contrôles renforcés sur l’ensemble des marchés de Noël en France pour éviter le risque de mimétisme », a-t-il poursuivi. « Il y aura aussi en complément une mobilisation plus forte encore du dispositif sentinelle sur l’ensemble du territoire ».
Dans la soirée, le chef de l’Etat a exprimé sur Twitter la solidarité de la « nation tout entière » après avoir présidé à Beauvau une réunion de crise interministérielle en présence du Premier ministre Edouard Philippe.
Le traditionnel marché de Noël de Strasbourg avait fait l’objet d’un projet d’attentat en décembre 2000. Il est protégé en permanence par un important dispositif de surveillance. Environ 260 policiers nationaux sont notamment mobilisés.
En décembre 2016, le marché de Noël de Berlin avait été visé par un attentat au camion-bélier revendiqué par le groupe État islamique qui avait fait douze morts.
Après l’attaque de mardi soir, la « Grande Ile », le centre historique de Strasbourg, a été entièrement bouclée par les forces des l’ordre.
Selon la préfecture, les mesures de confinement avaient été levées dans la nuit et l’accès au centre-ville était de nouveau possible à partir de 2H00.
Dans les rues quasiment désertes, quelques personnes rentraient chez elles. La rue des Grandes Arcades, où l’attaque s’est en partie passée, était bloquée par des rubalises avec des policiers armés en empêchant l’accès.
« Les écoles, les collèges et les lycées de Strasbourg seront ouverts demain (mercredi) », a-t-il ajouté.
La Première ministre britannique Theresa May s’est dite « choquée et attristée par la terrible attaque », tandis que le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert, s’est dit « bouleversé par les terribles informations de Strasbourg ». Le vice-premier ministre italien Matteo Salvini, ancien député européen, a assuré de son « engagement total pour que les terroristes soient débusqués, bloqués, éliminés, en Europe et dans le monde, par tous les moyens licites nécessaires ».
Cette fusillade intervient alors que la France vit sous une menace terroriste élevée depuis la vague d’attentats jihadistes sans précédent qui a fait 246 tués depuis 2015.
La France a été frappée deux fois cette année au cours d’attaques qui ont fait cinq morts.
Le dernier a succombé à une attaque au couteau menée par Khamzat Azimov, assaillant de 20 ans abattu par la police, dans le quartier touristique de l’Opéra, à Paris, le 12 mai 2018.
La précédente attaque s’était produite le 23 mars à Carcassonne et à Trèbes (Aude): dans son périple meurtrier, Radouane Lakdim, un délinquant radicalisé de 25 ans, avait volé une voiture à Carcassonne dont il avait abattu le passager et blessé le conducteur par balles. Il avait ensuite tiré sur des policiers devant leur caserne avant d’entrer dans un supermarché à Trèbes où il avait tué un boucher, un client ainsi que le lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame qui s’était offert comme otage à la place d’une femme.
L’attaque de Strasbourg intervient en pleine crise des « gilets jaunes » en France. Mardi soir, sur une page Facebook annonçant un « Acte V » des manifestations samedi, certains évoquaient une « manipulation » de l’Etat ou « un soi-disant attentat ».
(avec Afp)