samedi , 7 novembre 2020
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Présidentielle : Opposition congolaise prépare la riposte

Face à la volonté manifeste de la majorité au pouvoir de tripatouiller le jeu électoral, l’Opposition bat le rappel des troupes pour consolider son unité. C’est loin des terres congolaises que l’Opposition tente de se reconstitue. À Bruxelles, Moïse Katumbi et Adolphe Muzito tentent de réactiver Genval. Mais, le contexte est tout à fait particulier. Il est bien différent de l’environnement politique de 2016. Au cours de leur séance de travail, les deux leaders « ont condamné l’instrumentalisation de la Cour Constitutionnelle qui, pour des raisons politiques, continue à exclure des candidats à l’élection présidentielle. Ils ont confirmé leur engagement à mettre en œuvre les termes de la déclaration commune de l’Opposition politique et des candidats à l’élection présidentielle en République Démocratique du Congo faite à Kinshasa, le jeudi 24 août 2018 ». Ils ont à cet effet rappelé « la nécessité de la révision du fichier électoral et de la décrispation politique comme préalable à la tenue des élections, particulièrement la libération de tous les prisonniers politiques, le retour de certains leaders politiques forcés à l’exil et le respect du droit de manifestation pacifique conformément à la Constitution et l’Accord de la Saint-Sylvestre ».

Comme en 2016, à la création à Genval du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement, c’est encore à Bruxelles, dans la capitale belge, que l’opposition congolaise se donne rendez-vous au courant de cette semaine pour constituer un front pour l’alternance démocratique. En séjour en Belgique, Adolphe Muzito, candidat recalé à la présidentielle, en a longuement discuté avec Moïse Katumbi, un autre exclu de la présidentielle, avant d’en faire part à Jean-Pierre Bemba, également écarté de la course présidentielle. D’autres leaders de l’Opposition sont annoncés à Bruxelles, notamment Freddy Matungulu, Martin Fayulu, Félix Tshisekedi et éventuellement Vital Kamerhe. Si à Kinshasa, le pouvoir a réussi à truquer le jeu électoral, c’est à Bruxelles que l’Opposition prépare la riposte.

Face à la volonté manifeste de la majorité au pouvoir de tripatouiller le jeu électoral, l’Opposition bat le rappel des troupes pour consolider son unité. C’est loin des terres congolaises que l’Opposition tente de se reconstitue.

Tout se passe comme en 2016 lorsqu’est né à Genval, dans la banlieue bruxelloise, la Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement (Rassop). À l’époque, c’est Etienne Tshisekedi qui était aux commandes de ce grand rassemblement de l’Opposition. Sa mort en février 2017 avait créé un vide au sein de l’Opposition, faisant chavirer le Rassop jusqu’à sa scission avec le départ de l’aile portée par Bruno Tshibala et Joseph Olenghankoy.

À Bruxelles, c’est cet esprit de Genval que Moïse Katumbi, président d’Ensemble pour le changement, et Adolphe Muzito de l’URép (Unis pour la République) tentent de réactiver. Mais, le contexte est tout à fait particulier. Il est bien différent de l’environnement politique de 2016.

Concernant Moïse Katumbi, le pouvoir en place a réussi – en tout cas pour l’instant – à le disqualifier de la présidentielle. Quant à Adolphe Muzito, il a vu sa candidature à la présidentielle être définitivement rejetée sur décision de la Cour constitutionnelle. De ce point de vue, Katumbi et Muzito sont presque liés par le sort. Leur seul péché est d’avoir dénoncé les tares du pouvoir en place, sans jamais porter des gants. À Kinshasa, la MP/FCC a mis en œuvre tout l’appareil de l’Etat pour les disqualifier de la course présidentielle.

Autant qu’ils sont unis par un même sort, Katumbi et Muzito partagent désormais une vision commune, essentiellement tournée vers l’alternance démocratique.

Ils en ont d’ailleurs longuement parlé, mardi dernier, à Bruxelles, au terme d’un tête-à-tête qui introduit l’Opposition dans une nouvelle dynamique. Ils ont convenu d’amener l’Opposition à adopter un plan d’action commun de l’alternance démocratique. Pour le moment, l’heure est à la mobilisation.

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Au cours de leur séance de travail, les deux leaders « ont condamné l’instrumentalisation de la Cour Constitutionnelle qui, pour des raisons politiques, continue à exclure des candidats à l’élection présidentielle. Ils ont confirmé leur engagement à mettre en œuvre les termes de la déclaration commune de l’Opposition politique et des candidats à l’élection présidentielle en République Démocratique du Congo faite à Kinshasa, le jeudi 24 août 2018 ». Ils ont à cet effet rappelé « la nécessité de la révision du fichier électoral et de la décrispation politique comme préalable à la tenue des élections, particulièrement la libération de tous les prisonniers politiques, le retour de certains leaders politiques forcés à l’exil et le respect du droit de manifestation pacifique conformément à la Constitution et l’Accord de la Saint-Sylvestre ».

Pour concrétiser leur engagement et accompagner le peuple congolais sur le chemin de l’alternance démocratique, ils ont convenu de « mettre en commun leurs efforts afin de poursuivre les contacts avec tous les autres candidats à l’élection présidentielle et les principaux leaders de l’Opposition politique en vue d’organiser dans les meilleurs délais une réunion visant à mettre en œuvre un plan d’actions commun pour faire échec au régime de Monsieur Kabila et à la CENI qui tiennent à confisquer au peuple congolais le pouvoir de choisir librement ses dirigeants ». Aussi promettent-ils de « travailler à l’ébauche d’un programme commun des forces de l’Opposition en vue de dégager un consensus autour de la candidature commune de l’Opposition souhaitée par le peuple congolais ».

Dans la perspective de la constitution de ce nouveau front pour l’alternance démocratique, le leader du MLC, Jean-Pierre Bemba, également disqualifié par un arrêt de la Cour constitutionnelle, est associé à l’étape préliminaire des discussions. Le plus évident est que Bruxelles, capitale de l’Europe, va accueillir incessamment la grande rencontre de l’Opposition. À trois mois des élections de décembre 2018, le rendez-vous est crucial.

Sur place en Belgique, Katumbi et Muzito ont déjà travaillé sur les préalables. Leurs échanges du lundi 4 septembre ont permis de baliser la voie pour donner un nouveau souffle à l’Opposition congolaise. Ils ont pour cible le pouvoir en place à Kinshasa qui excelle dans les stratagèmes pour écarter de la course présidentielle tous ceux qui peuvent gêner la victoire du dauphin désigné du président Kabila, en l’occurrence Emmanuel Ramazani Shadary.

La prochaine rencontre de Bruxelles est très attendue. Katumbi, Bemba et Muzito y sont à pied d’œuvre. D’autres leaders de l’Opposition sont également annoncés à ce grand rendez-vous de la capitale belge, tous candidats à la présidentielle.

Cela démontre tout l’enjeu de ces échanges. Martin Fayulu, Félix Tshisekedi et Freddy Matungulu ne s’y opposent pas. Vital Kamerhe ne s’est pas non plus mis à l’écart. Son parti dit être au courant de ce qui se prépare dans la capitale belge.

Le moment de l’éveil

Face à une majorité au pouvoir qui a décidé de neutraliser tout ce qui est contraire à son projet, les leaders de l’Opposition se retranchent à Bruxelles pour se refaire une nouvelle santé politique. L’heure est grave, disent-ils.

Freddy Matungulu en a dalleurs fait mention, au lendemain de premiers arrêts rendus par la Cour constitutionnelle. Il n’a pas caché son dépit face à l’imposture qui se met en place. « Après la mise à l’écart de Moise Katumbi, ce développement éloigne un peu plus la nécessaire inclusivité du processus électoral. Bien plus, les invalidations écornent davantage un processus électoral déjà fortement handicapé par des financements insuffisants, l’obstination de la CENI à faire usage de la machine à voter rejetée par nos populations, un fichier électoral pipé et une capacité logistique de déploiement du matériel électoral incertaine. J’en suis profondément préoccupé », a indiqué Freddy Matungulu, dans une déclaration politique datée du lundi 3 septembre.

Les initiateurs de la rencontre de Bruxelles ont, « face à ce sombre tableau, appelé à une large évaluation de l’ensemble du processus électoral par l’opposition ».

« Nous devons en effet définir une position commune quant à la suite du processus. L’union demeure la seule clé de succès de notre quête pour l’indispensable alternance voulue par nos populations. Sans l’alternance, le chemin du travail bien fait et du progrès économique et social, que la kabilie a hermétiquement fermé, risque de ne plus jamais s’ouvrir pour notre pays », ont-ils indiqué.

Depuis Bruxelles, il y a bien des signaux qui rassurent. En séjour dans la capitale belge, Adolphe Muzito, artisan de cette rencontre de l’Opposition, a été reçu en audience par le chef de la diplomatie belge, Didier Reynders. Jean-Pierre Bemba est également retenu dans le registre d’audiences du vice-Premier ministre Belge.

Selon des canaux diplomatiques, Didier Reynders doit bientôt se rendre à Luanda en Angola pour activer une solution sous-régionale en vue de libérer le processus électoral de la RDC. Bref, l’Opposition se reconstitue à Bruxelles.

Quoi qu’écartés de la course présidentielle, Katumbi, Bemba et Muzito ne cachent pas leur optimiste, convaincus que l’alternance démocratique en RDC est plus que jamais irréversible.

(avec Le Potentiel)

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