samedi , 7 novembre 2020
Accueil / Politique / Ebola : Risque de propagation en RDC

Ebola : Risque de propagation en RDC

26 morts de suite de fièvre hémorragique; 21 cas confirmés Ebola, 21 probables et 4 suspects; 3 zones de santé touchées : Ikoko, Bikoro et Wangata (Mbandaka); Début de la vaccination ce lundi 21 mai; Le risque de propagation reste élevé. Depuis la déclaration, le 8 mai, par le ministère de la Santé de la République démocratique du Congo, de l’épidémie à virus Ebola dans la province de l’Équateur, plus précisément dans les  zones de santé de Bikoro, Ikoko et tout récemment à Wangata, en pleine ville de Mbandaka, un comité d’urgence a été convoqué, le vendredi 18 mai à Genève en Suisse, par le Directeur général de l’OMS (Organisation mondiale de la santé). Cette rencontre a été dictée en vertu du Règlement sanitaire international (RSI).

L’objet de ces discussions a été d’examiner l’état de la question de l’épidémie à virus Ebola en RDC et décider s’il constitue une « menace internationale ». A l’issue cette réunion, le Comité d’urgence a estimé que « les conditions d’une urgence de santé publique de portée internationale (USPPI) n’étaient pas réunies pour le moment ».Certes, il n’y a pas de menace internationale sur cette 9ème  épidémie à virus Ebola. A ce jour, la situation reste cependant préoccupante tant au niveau national que celui de la sous-région au regard de la propagation rapide de cette maladie.

La situation épidémiologique de la maladie à virus Ebola en date du 18 mai 2018 est préoccupante selon les données du ministère de la Santé : au total, 46 cas de fièvre hémorragique ont été signalés dans la région, dont 21 confirmés, 21 probables et 4 suspects ; 3 nouveaux cas suspects enregistrés, dont 2 à Iboko et 1 à Wangata ; 4 cas confirmés par test laboratoire à Iboko ;1 décès de cas confirmé à Bikoro. Le total des décès est ainsi passé de 25 à 26 ; la létalité parmi les confirmés est de 9,5% (2 sur 21) ; aucun nouveau professionnel de santé n’a été contaminé.

4 millions USD de la RDC pour la riposte

Au lendemain de la réunion de Genève, le chef de l’État, Joseph Kabila, a présidé le conseil des ministres, le samedi 19 mai, dont le seul objet à l’ordre du jour a été la riposte à la maladie à virus Ebola, déclarée dans la province de l’Équateur. Le gouvernement a  décidé d’augmenter sa contribution à la riposte d’urgence qui s’élève désormais à plus de 4 millions USD. Tout aussi, le Conseil des Ministres a endossé la décision de « l’instauration de la gratuité des soins dans les zones de santé touchées et de la prise en charge sociale de toutes les victimes d’Ebola et de leurs proches ».

Depuis le début de l’épidémie, l’OMS, le MSF, l’UNICEF, qui sont des partenaires permanents de la RDC en matière de santé, ont été à rescousse de Kinshasa pour tenter de contenir l’épidémie. Cependant, des nouveaux cas suspects sont enregistrés chaque jour. Il se pose donc l’urgence d’une riposte rapide d’autant que des cas maladie à virus Ebola ont été signalés à Wangata, une commune urbaine de la ville de Mbandaka (1,2 million d’habitants). Ces populations ont accès à la métropole Kinshasa (12 millions d’habitants) soit par voie aérienne, soit par le fleuve qui reste peu contrôlé par les services compétents. D’où, la nécessité d’une conjugaison d’efforts de la RDC avec ses partenaires pour circonscrire l’épidémie.

L’appel à la solidarité internationale

Bien qu’elle ne constitue pas encore une menace internationale, cette énième épidémie d’Ebola impose la mobilisation non seulement de la RDC, foyer de la maladie, mais aussi de toute la communauté internationale. Déjà, à l’issue de la réunion de Genève, le Comité d’urgence, réuni autour de l’OMS, en présence des experts du gouvernement congolais, a recommandé expressément une « riposte vigoureuse », comptant sur la solidarité internationale.

« Le gouvernement de la RDC, l’OMS et ses partenaires restent engagés dans une riposte vigoureuse – sans cela, la situation risque de se dégrader de manière significative. Cette réponse devrait être soutenue par l’ensemble de la communauté internationale », a indiqué le comité d’urgence.

Dans une déclaration faite le 18 mai, la Conférence épiscopale nationale du Congo a justement appelé à cette solidarité internationale pour une riposte contre Ebola en RDC. « La CENCO encourage l’action des autorités compétentes nationales, provinciales et locales mais aussi celle des partenaires nationaux et internationaux (OMS, MSF…) qui, avec la participation des communautés locales, sont à pied d’œuvre pour prendre toutes les dispositions nécessaires afin de rendre la riposte effective, contenir la propagation de cette terrible maladie et ainsi assurer la sécurité et la santé de la population », note le communiqué signé par Marcel Utembi Tapa, président de la Cénco.

Moïse Katumbi appelle à la solidarité internationale

Dans un communiqué publié le dimanche 20 mai, Moïse katumbi, président d’« Ensemble pour le changement » et candidat à la prochaine élection présidentielle, a appelé à la solidarité des États Unis,  de l’Union européenne, de la Russie, de la Chine et de tous les partenaires de la RDC afin, dit-il, « d’organiser une riposte efficace et ainsi sauver  des millions des Congolais de ce grave péril ».

Les défis

L’appel à une solidarité internationale est dicté par les défis qui se posent sur le terrain dans les zones de santé affectées de la province de Mbadaka : le risque de propagation plus rapide étant donné que le virus Ebola s’est maintenant propagé dans une zone urbaine (Wangata) ; il y a plusieurs éclosions dans des régions éloignées et difficiles à atteindre; le personnel soignant a été infecté, ce qui peut constituer un risque d’amplification supplémentaire.

L’autre défi c’est le risque de propagation internationale est particulièrement élevé puisque la ville de Mbandaka se trouve à proximité du fleuve Congo, qui a un trafic régional important à travers les frontières poreuses.

Les zones de santé affectées présentent également d’énormes défis logistiques compte tenu de la médiocre infrastructure et de l’éloignement de la plupart des cas actuellement signalés. « Tous ces facteurs affectent la surveillance, la détection et la confirmation des cas, la recherche des contacts et l’accès aux vaccins et aux agents thérapeutiques, soutient le comité d’urgence », préviennent les experts du comité d’urgence.

L’action des partenaires

Dans les zones de santé touchées par des cas de fièvre hémorragique, le personnel médical congolais des différents centres de santé et hôpitaux travaillent en partenariat avec l’OMS, Médecins sans frontière (MSF), l’UNICEF. Après la déclaration de l’épidémie, des gros moyens matériels ont été déployés sur le terrain pour faciliter le travail du personnel médical.

A Mbandaka, Les équipes d’urgences de MSF ont installé une zone d’isolation dans l’hôpital principal de la ville (5 lits), et dans l’hôpital de Bikoro (10 lits). MSF devrait également construire 2 centres de traitement Ebola avec 20 lits chacun. Dans les prochains jours, plusieurs dizaines de tonnes de matériel arriveront à  Mbandaka (kits médicaux ; kits de protection et désinfection incluant des articles comme des vêtements de protection, des gants et des bottes ; kits de logistique et d’hygiène incluant des articles comme des bâches, des kits de sprayage de chlore, des kits de traitement d’eau ; médicaments palliatifs), a annoncé MSF le 17 mai dans un communiqué de presse. Parmi le personnel MSF envoyé sur le terrain, certains font partie des plus expérimentés en matière d’Ebola (personnel médical, experts en prévention aux infections et logisticiens).

Quant à la Commission européenne, elle a annoncé un ensemble de mesures d’aide humanitaire d’urgence. « Un montant initial de 1.5 million d’euros permettra d’apporter un soutien logistique à l’Organisation mondiale de la santé (OMS), et une aide supplémentaire de 130 000 euros est offerte à la Fédération internationale de la Croix-Rouge pour des interventions vitales effectuées par la Croix-Rouge congolaise », a annoncé la commission européenne qui a mis en place aussi un service aérien humanitaire « ECHO Flight » susceptible de transporter des experts médicaux, du personnel d’urgence ainsi que du matériel dans les zones touchées par le virus.

Pour renforcer l’équipe du personnel médical, l’OMS a dépêché, le 19 mai à Mbandaka, plus de 35 experts de la vaccination. Parmi eux 16 ont été mobilisés en Afrique de l’Ouest pour leur expérience antérieure dans la riposte contre Ebola et 19 autres de la RDC, récemment formés à Kinshasa.

D’autres partenaires répondent à la riposte. C’est le cas de l’USAID qui a débloqué le week-end  dernier 1 million USD pour soutenir la riposte contre l’épidémie à virus Ebola dans la province de l’Équateur. Quant à la Chine, son ambassadeur en RDC, a remis au ministre de la Santé du matériel médical dans le cadre de la riposte contre Ebola. De son côté, le Canada a annoncé, le samedi 19 mai 2018, son aide humanitaire supplémentaire  de 2,5 millions de dollars pour lutter contre le virus Ebola en RDC. L’OMS, l’UNICEF et le Service aérien humanitaire du PAM pour le traitement et la prévention des maladies, l’approvisionnement en eau, l’assainissement, sont les agences qui vont bénéficier de cette aide financière.

Polémique sur le vaccin

La campagne de vaccination débute ce lundi 21 mai dans les zones de santé touchées de l’Equateur. Le ministre de la Santé, Oly Ilunga, a précisé qu’il s’agit d’une « vaccination ciblée » qui concerne les contacts, c’est-à-dire ceux qui ont été en contact directement avec les malades, et les contacts des contacts. La RDC a réceptionné à Kinshasa 5 400 doses de vaccins fournis par l’OMS sur un total de 300 000 doses disponibles. Le premier lot de ces vaccins a été acheminé le samedi 19 mai à Mbandaka.

Pour le ministre de la Santé, compte tenu du risque élevé de propagation du virus, il faut vacciner les personnes pour endiguer la maladie. « Aujourd’hui comme il y a une épidémie, nous devons utiliser toutes les ressources disponibles pour épargner un maximum de vie. On doit mettre tous les moyens pour épargner de vie. Chaque vie compte. Le vaccin permettra de nous sécuriser. Ce vaccin permettra très vite de circonscrire l’épidémie. C’est un devoir de le faire », soutient le ministre de la Santé.

Pour sa part, le Comité national d’éthique de la santé (CNES), une institution du ministère de la Santé, en date du 14 mai, avait fait une requête de demande d’une instruction du ministre de la Santé à l’endroit  de l’OMS et du PEV de « soumettre  le protocole sur le vaccin  expérimental  contre le virus Ebola avant son application » en RDC. « Conformément au code de Nuremberg, à la déclaration d’Helsinki, à la Déclaration de l’UNESCO et aux pratiques actuelles, nous vous prions de bien vouloir  instruire l’OMS Afro et la Direction du PEV de soumettre le Protocole de ce vaccin au CNES pour une évaluation éthique avant toute administration à toute personne ciblée à Bikoro et Iboko », a écrit le CNES s’adressant au ministre de tutelle.

C’est un non catégorique que le ministre de la Santé a réservé à cette requête.  « Lorsque l’efficacité d’un vaccin a été démontrée  par des essais cliniques internationaux, il n’y a plus lieu d’en refaire une expérimentation spécifique en RDC. Pour ce vaccin, l’efficacité a été démontrée par l’OMS et les autorités scientifiques mondiales. Ceux qui disent que c’est un vaccin expérimental, ils parlent par ignorance. Je pense aussi, il y a un manque d’éthique. Parce que lorsqu’il y a des vies humaines qui sont en danger, lorsque des familles ont perdu un des proches, pareilles considérations sont déplacées ».

Quand on demande au ministre de la Santé s’il était indispensable de commander des vaccins, sa réponse est affirmative. « Nous avons fait la demande de vaccin dès le jour de la déclaration de l’épidémie, dans la mesure où  il y avait des professionnels de la santé qui étaient atteints. Pour nous, c’était quelque chose de très dramatique. Nous devrions prendre des dispositions pour qu’il n’y ait pas d’autres professionnels de la santé qui soient atteints. Nous avons demandé le vaccin aussi parce que dès le début il y avait deux zones de santé qui étaient touchées et que ces zones de santé étaient en contact direct avec une zone de santé urbaine.  Pour nous, c’était important d’avoir le  vaccin ».

Quant au conditionnement des vaccins, le ministre de la santé a assuré que la RDC a mis au préalable une chaîne de froid avant l’arrivée des doses de vaccin. « Il fallait mettre en place la logistique de la chaine de froid avant de commencer à déplacer les vaccins en RDC parce qu’il faut garantir une conservation à moins 80°C jusqu’au lieu d’administration. D’ici le début de la semaine prochaine, toute la chaine de froid, à moins de 80°C, sera garantie jusqu’à Bikoro et dans les aires de santé touchées », a-t-il assuré.

Par ailleurs, le ministre de la Santé balaie d’un revers de la main les allégations selon lesquelles ce vaccin ne serait pas efficace et qu’il ne serait pas adapté à la souche de la maladie détectée en RDC. « C’est un vaccin qui n’est plus expérimental. C’est un vaccin qui a prouvé son efficacité. Il a été effectivement élaboré pendant l’épidémie en Guinée à partir du séro-type Zaïre. Lorsqu’il y a eu la maladie à virus Ebola en Guinée, il fallait préparer rapidement un vaccin. Ils ont pu le préparer à partir des souches existantes. Ce sont les souches de la RDC qui avaient contribué à élaborer les souches vaccinales pour l’épidémie en Guinée. Ce vaccin a été testé et toutes les personnes  qui avaient été vaccinées  avec le vaccin séro-type zaïre n’ont pas développé de maladie à virus Ebola », tranche Oly Ilunga.

[lePotentiel]

A lire aussi

Les oubliés : Chronique des Héros de Wenge Musica

C’est le nom de cette chronique qui retrace dans les moindres détails les noms et …

Laisser un commentaire