samedi , 7 novembre 2020
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Iran : Les prix élevés étranglent les iraniens

Même si Téhéran est peu touchée par les manifestations contre le pouvoir qui agitent depuis jeudi plusieurs villes d’Iran, les habitants de la capitale se plaignent de leur situation économique et réclament des actes au gouvernement.

« La vie est vraiment dure, les prix élevés nous étranglent. Mon mari est fonctionnaire mais son salaire est loin d’être suffisant pour que nous puissions joindre les deux bouts », explique Farzaneh Mirzaie.

Cette femme de 42 ans et mère de deux enfants explique que la plupart des membres de sa famille travaillent dans une fabrique de tapis à Kashan, à 250 km au sud de Téhéran, mais qu’ils ont tous perdu leur emploi récemment.

« Le propriétaire de l’usine ne pouvait plus se permettre d’acheter du fil pour fabriquer ses tapis et il a viré tout le monde. Comment vont-il survivre? », se demande-t-elle.

Cette histoire est symptomatique des difficultés économiques que traverse l’Iran, un pays qui tente de se remettre de longues années de mauvaise gouvernance et de sanctions économiques internationales paralysantes.

Dimanche soir, le président Hassan Rohani a réagi aux manifestations, qui ont fait 12 morts et conduit à l’arrestation de centaines de personnes, en expliquant que les Iraniens devaient avoir le droit de s’exprimer mais sans recourir à la violence.

« Il dit que c’est possible pour les gens de manifester mais nous avons peur de parler. Même là, j’ai peur de vous parler », assure à l’AFP Sarita Mohammadi, une enseignante de 35 ans.

Nous devrons payer

Beaucoup de Téhéranais sont néanmoins rebutés par la violence des manifestants qui ont attaqué des banques, des bâtiments administratifs et des symboles du régime.

Sara, une étudiante de 26 ans vêtue du traditionnel tchador, adhère à la ligne gouvernementale selon laquelle les protestations sont « guidées depuis l’étranger ». Mais elle a le sentiment qu’elles ont été provoquées par « les difficultés économiques des gens ».

« Je ne suis pas du tout pour les manifestations dans lesquelles les biens publics sont vandalisés », abonde Shiva Daneshvar, femme au foyer de 55 ans. « Si certains cassent des fenêtres, nous devrons payer (leur réparation) plus tard. »

Pourtant, chacun comprend la frustration en germe au sein de la société iranienne.

« Je pense que les gens n’aiment pas vandaliser et incendier les lieux mais c’est leur seule façon de faire entendre leur voix », justifie Nasser Khalaf, 52 ans, employé d’une compagnie pétrolière, qui dit avoir deux fils au chômage.

Certains estiment que la nation n’a pas été récompensée après avoir enduré des décennies de difficultés – la révolution de 1979, huit ans de guerre avec l’Irak dans les années 1980 et les sanctions internationales, partiellement levées après l’accord sur le nucléaire iranien de 2015.

« Après 40 ans (de République islamique, ndlr), ils ont réalisé que toutes ces épreuves (…) étaient vaines », estime Arya Rahmani, un infirmier de 27 ans. « Je travaille mais je vis dans la crainte d’être renvoyé demain ».

Trump dans son palace

Le soutien affiché du président américain Donald Trump aux manifestants fait sourire à Téhéran.

Ces tweets sont « inutiles », lâche Arya. « Trump vit dans son palace et moi ici, je suis arrêtée. Que peut-il faire? ».

« Cela aurait été mieux qu’il ne soutienne pas les protestations », surenchérit Nasser, qui estime également que le soutien aux manifestants de la part de groupes d’opposition basés à l’étranger n’est pas une bonne chose.

Beaucoup d’Iraniens nourrissent une profonde méfiance envers Trump après sa décision de leur interdire l’entrée aux Etats-Unis, à l’instar d’autres pays musulmans, dans un décret visant à prévenir l’entrée de « terroristes » selon Washington.

« Le gouvernement devrait améliorer la situation des gens à un niveau tel que Trump n’oserait plus dire quoi que ce soit », relève Mirzaie, femme au foyer, qui déplore notamment que l’Iran ne parvienne pas à exploiter tout son potentiel économique.

« Notre pays vaut de l’or », assure-t-elle. « Mais nous ne tirons vraiment pas profit de ce qu’on a. »

[Afp]

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