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"Joseph KABILA KABANGE", le 15 Novembre 2015, Palais du Peuple, Kinshasa.

Corruptions en RDC : BGFiBank en justice contre un journal belge

Encore une fois, notre correspondant occasionnel de Bruxelles apporte une nouvelle lumière sur l’affaire du dossier publié par le journal belge Le Soir au sujet de certaines opérations bancaires au sein de la BGFiBank, opérations présentées comme des canaux de corruption du régime du Président Kabila ainsi que sa famille biologique et d’autres proches. Léon Kroegell indique que la banque incriminée envisage sérieusement de saisir la justice pour laver son image ternie dans cette affaire qui, tout compte fait, aura été une vaste manipulation ayant des visées politiques qui cadrent avec la situation du moment en RDC.

Le quotidien Le Soir subi un retour des flammes dans l’affaire qu’il a lancée au sujet de certaines transactions bancaires dans lesquelles ce journal a impliqués, sans détails ni démonstration palpable (comme je n’ai cessé de le dire depuis le début) de l’implication directe ou indirecte du régime Kabila et sa famille biologique. Je viens d’apprendre que cette banque, qui est une institution financière ayant pignon sur rue en Afrique centrale depuis plus de 40 ans et non une banque congolaise, a réservé une réaction cinglante mercredi 2 novembre au cours d’une conférence de presse animée par son Directeur général adjoint, Abder Kader Diop. Celui-ci a déclaré, selon ce que rapporte la presse locale, que la publication du Soir est une « vaste opération de tromperie, de manipulation et de mystification de l’opinion et de la conscience des citoyens. » Donnant certains détails sur, notamment, les opérations sur les comptes de la CENI, Abder Kader Diop a expliqué que« la CENI reçoit essentiellement du gouvernement congolais des approvisionnements en Franc Congolais. Dans le but de faire face à ses besoins d’exploitation qui s’expriment principalement en dollars américains, BGFIBANK a consenti à la CENI une ligne de crédit en dollars américains (…) pour lui permettre de poursuivre ses besoins d‘exploitation ». Et de poursuivre :« La banque s’est engagée à accompagner la CENI à obtenir des devises américaines en fonction de leur disponibilité sur le marché de change afin de poursuivre son programme de dépenses car elle dispose essentiellement des avoirs en francs congolais ». Conclusion : « la devise des avoirs de la CENI telle que communiquée dans l’article du journal Le Soir était donc trompeuse et malveillante ». Et l’estocade :« Insolite et ridicule lorsque le périodique Le Soir qualifie de blanchiment des capitaux, les transactions de retrait opérées sur le compte de la CENI quand il est certain, prouvé et affirmé par le périodique « Le Soir » que les fonds y logés proviennent du gouvernement. »

Quid alors de l’implication de Joseph Kabila dans l’affaire ? A cette question, le DGA de BGFiBank est formel : Kabila n’est pas un des clients de la banque. Des privés congolais détiennent 40% de parts dans cette banque, mais le nom de Joseph Kabila ne figure pas sur la liste de ces clients.

Le DGA de BGFiBank accuse, en fin de compte, le journal Le Soir de complicité avec Jean-Jacques Lumumba pour n’avoir pas vérifié les déclarations de ce dernier qui, selon lui, pouvait voir le portefeuille de la banque, mais ne pouvait pas faire des opérations. Et Abder Kader ne décolère pas : « Quand ils disent qu’ils ont des documents, pourquoi ils ne nous ont pas attendus pour confronter avec la réalité des choses avant de publier ? Pourquoi ils se sont précipités à publier ? »

Il se rapporte, dans les couloirs de la banque, selon des contacts, que BGFiBank envisage sérieusement de saisir la justice belge pour laver l’opprobre dont elle est couverte dans cette affaire qui évoque des faits graves comme des opérations de blanchiment d’argent. La banque met dans la balance ses plus de 40 ans d’existence et sa réputation en tant qu’institution financière parmi le tiers de celles qui sont pignon sur rue en Afrique centrale, dans l’espace CEMAC.

Cette initiative est à encourager, car elle permettrait de mettre à nu ce qui se trame derrière ces « révélations » qui n’ont eu pour effet, à ce jour, que d’éclabousser des noms dans une opération qui a tout d’une cabale politique répondant au contexte du moment. Pour y parvenir, Le Soir s’est fait berner avec un scoop qui n’en est pas et porté par le nom emblématique d’un jeune homme qui n’avait même pas une année d’ancienneté à BGFiBank pour accéder à des informations et des documents fallacieusement présentés comme une bombe. Pour rajouter du crédit à l’opération, Collette Braeckman, journaliste connaissant bien la RDC, a été mise à contribution.

Maintenant que le vent de la conspiration est en train de tourner, la justice devra intervenir pour élucider le fin mot de l’affaire. En attendant, la CENI, également citée dans l’affaire, demeure en embuscade après avoir dénoncé, elle aussi, les accusations portées à sa charge. « La CENI dénonce le lien établi abusivement entre les transactions effectuées régulièrement sur ces comptes pour des raisons  opérationnelles évidentes et la non tenue des élections en 2016 », peut-on lire dans un communiqué de cette institution qui note, par ailleurs qu’«il s’agit là d’un discours malhonnête destinés à jeter le discrédit sur le processus électoral en cours, à désorienter l’opinion nationale et à renforcer le climat de méfiance et de confusion au sein de la population en RDC».

La centrale électorale congolaise fait également savoir que « toutes les transactions effectuées sur le compte de la CENI auprès de la banque citée sont conformes à la réglementation du change en RDC édictée par la banque centrale du Congo». Quant à la ligne de crédit évoquée par Le Soir, la CENI révèle qu’«elle a été sollicitée pour assurer les engagements vis-à-vis des fournisseurs étrangers aux échéances convenus après l’appel d’offre international et pour respecter le chronogramme de l’opération de la révision du fichier électoral. A cet effet, le compte CDF de la CENI a été utilisé comme collatéral pour l’obtention de cette ligne de crédit. Les conditions de cette créance sont payées selon les conditions négociées entre la CENI et la BGIFIBANK et ne s’écartent nullement les pratiques du marché ».

Encore une fois, le dossier est à suivre.

Léon Kroegell

(Correspondance particulière de Bruxelles)

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