samedi , 7 novembre 2020
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Corée du Sud : Révolution industrielle et numérique

Pour un journaliste étranger ayant visité pour la première fois Seoul, la capitale de la République de Corée, deux images frappent. La première a trait à la fabrication de la voiture « Hyundai »  et  au téléphone portable « Samsung ». En d’autres termes, le pays du matin calme connaît la révolution industrielle et numérique.  La deuxième image qui frappe reste la Zone Démilitarisée de 4 Km de large et de 241 Km de long qui sépare les deux Corées (Nord et Sud), le dernier vestige de la guerre froide.

Pour comprendre la situation de « pays du matin clame », il convient de jeter un regard dans l’histoire de ce péninsule situé entre la Mer jaune (Chine) et la Mer de l’Est (Japon).  Il découle de cette lecture historique, d’une part, l’origine de la division de la Corée en deux pays et, d’autre part, l’explication de la croissance économique exceptionnelle coréenne qualifiée de « miracle du fleuve Hangan ».

Au pays du matin clame

L’histoire de la Corée reste tourmentée par les occupations étrangères. Ce pays du matin calme  est victime de sa position géostratégique. Entourée par les grandes puissances telles que la Chine, le Japon  et la Russie, la Corée a souffert de neuf cents invasions en deux mille ans. Ce qui reste un record dans l’histoire de l’humanité, soulignent Don Oberdorfer et Robert Carlin dans leur ouvrage ‘The Two Koreas’, A contemporary history. Ce pays a connu cinq périodes d’occupations dans son histoire par la Chine, les Mongols, le Japon et après la deuxième guerre mondiale, les Etats-Unis d’Amérique(USA) et l’Union Soviétique (URSS).

Parmi les occupations de la Corée par les puissances étrangères, celle de la Chine fut acceptée et influença la culture coréenne. Quant au Japon,  il a occupé la Corée en 1905 et l’a annexé comme sa possession en 1910.  Cette colonisation prendra fin en 1945 avec la deuxième guerre mondiale gagnée par les Usa et l’URSS.  Avec la défaite du Japon et le début de la guerre froide, les Américains et les Soviétiques vont occuper la Corée. Les troupes américaines vont occuper la zone Sud au 38° parallèle et les Soviétiques la partie Nord de 38° de ce parallèle.

Ainsi, les Américains proclament officiellement, le 15 août 1948, la République de Corée au Sud avec comme capitale Séoul. Elle adopte l’économie capitaliste. De leur côté, les Soviétiques proclament, le 9 septembre 1948, la République Populaire Démocratique de Corée dans le Nord avec comme capitale Pyongyang. Dans ce partage, la République de la Corée (Sud) va hériter la grande partie de la population, les terres arables et la faible industrie. De son côté, la République Populaire Démocratique de Corée (Nord) va hériter la grande partie de l’industrie, l’électricité et les ressources minières.

Après ce partage, une chose reste sûre : chaque camp estime qu’il est légitime de représenter la Corée unie.  Ainsi, la Corée se retrouve avec deux présidents : Syngman Rhee au Sud soutenu par les Américains et Kim Il Sung au Nord soutenu par les Soviétiques.

Miracle sur fleuve Hangang

Si les élites politiques coréennes du Nord  ont investi plus dans l’industrie militaire avec la maîtrise de la technologie nucléaire, celles du Sud, désavantagées sur le plan industriel lors du partage de la Corée,  ont orienté leur industrie vers l’automobile, le fer et l’acier, la construction navale, les produits chimiques, l’électronique, les métaux non ferreux et les machines-outils avec la maîtrise du numérique.  Ainsi, le succès économique qu’a connu la Corée du Sud est qualifié de « miracle sur le fleuve Hangang » parce que la plupart d’installations industrielles du pays ont été détruites au cours des 3 ans de la guerre de Corée (1950-1953) et le pays était dépourvu de capital et de ressources naturelles.

Ce miracle économique ne serait pas possible sans la volonté d’un grand homme d’Etat. Il s’agit du Président Park Chung Hee, Père de l’actuelle Présidente de la République de Corée.  Après la prise du pouvoir par coup d’Etat militaire le 16 mai 1961, le général Park Chung Hee va mettre son pays sur la voie de modernisation économique.

Pour le Président Park Chung Hee, le développement industriel  avait pour objectif de faire devenir la Corée du Sud plus puissante économiquement et de sortir le peuple coréen de la pauvreté, soutient Daniel Tudor dans son ouvrage, Korea, The impossible Country. Après la prise du pouvoir, le Président Park va faire appel à la diaspora coréenne. Le premier à contacter, c’est le fondateur de Samsung, Lee Byung-Chul, le plus grand industriel dans les années 1950 qui était au japon lors du coup d’Etat du Général Park. Cet industriel sera mis à la tête d’une nouvelle fédération des industriels représentant la plus grande partie de sociétés  coréennes.

En dehors des industriels et des hommes d’affaires coréens, le président Park va confier la charge de l’économie aux élites coréennes ayant fait de très grandes études dans les universités américaines et ayant aussi l’expérience dans le domaine de planification économique. Ce sont ces experts qui seront en charge des agences de planification sous sa responsabilité directe.

Malgré le passé colonial douloureux avec le Japon, le président Park va normaliser les relations de son pays avec Tokyo. Le président coréen estimait que la normalisation entre Seoul et Tokyo devrait amener à la Corée les investissements et le transfert de technologies pour le plan de la modernisation de l’économie nationale, estime Kyung Moon Hawang, dans son ouvrage A History of Korea.

Cette normalisation encouragée par Washington a permis à la Corée du Sud de recevoir un financement de 800 millions de dollars du gouvernement japonais et d’autres d’investissements de firmes japonaises, relèvent Don Oberdorfer et Robert Carlin.

Par ailleurs, les relations entre la Corée du Sud et les Etats-Unis d’Amérique ont beaucoup contribué au miracle économique coréen. Avec  la guerre du Vietnam, la Corée, qui avait décidé d’envoyer plus de 17 000 soldats comme soutien aux troupes américains,  a été gratifiée à travers de contrats d’approvisionnement  de l’armée américaine par des sociétés coréennes.

De 1962 à 1967, le premier plan économique  de cinq ans, le gouvernement a mis en place les fondations pour un développement industriel dans le domaine de cimenterie, chimies, raffinage du pétrole et textiles. Le second cinq ans du plan de développement économique qui a commencé en 1967, a été axé sur les industries d’exportations.

Pour réaliser son projet de modernisation de l’économie, le président Park a mis en place des conglomérats industriels qui recevaient pour la plupart le soutien financier de l’Etat. Depuis 1960 , le gouvernement a sélectionné des sociétés performantes tournées vers l’exportation auxquelles plusieurs facilités ont été accordées : importants crédits au taux d’intérêts très bas, facilités de licences d’exportation,  baisse d’impôts et la gestion du gouvernement coréen.

Par  ailleurs,  les aides américaines et japonaises ne sont pas les seuls qui peuvent justifier le miracle sur le fleuve Hangang. Il y aussi le patriotisme du peuple coréen et de ses dirigeants parmi lesquels le  président Park resté incorruptible et humble. En 1967, le président Park a décidé de financer un projet industriel d’un citoyen coréen parti de rien pour construire une grande industrie automobile Daewoo qui est aujourd’hui parmi les grandes Chaebols.

La Corée du sud dépend massivement de quelques conglomérats industriels énormes qu’on appelle Chaebol.   Les quatre plus importants (Samsung, Hyundai, Lucky-Gold-Star et Daewoo) ont des ventes qui représentent la moitié du PNB.

Et le patriotisme coréen,  on le retrouve dans la constitution du Sud qui stipule que “le droit de propriété est garanti pour chaque citoyen. Et qu’une situation injuste doit être corrigée si le mésusage du capital, employé comme instrument  l’économie de marché libre, cause des dommages aux personnes.

L’autre manifestation  du patriotisme coréen se trouve le remboursement de la dette de la Corée auprès du FMI. 3.5 Millions de coréens au répondu à l’appel du gouvernement de collecter de l’or pour rembourser les fonds empruntés au FMI.

En tout état de cause la guerre du Vietnam, les investissements japonais et le transfert de la technologie ne sont pas seuls à expliquer le miracle économique Sud-coréen. Il y a plus le patriotisme et la vision des élites coréennes menées par le président Park Chum Hee. Avec la volonté politique affichée la Corée du Sud s’est imposée comme grand pays industriel, à part les USA, le Japon et la Chine, maitrisant la technologie numérique comme élément de puissance pour le XXIème siècle.

Comme d’autres pays de l’Asie de l’Est ayant connu une croissance exceptionnelle, quatre éléments ont été à la base du miracle économique Sud-coréen : l’accent mis sur l’éducation, le niveau élevé d’épargne nationale, la recherche économique au sein d’un cadre politique fort et afin la recherche de la croissance par les exportations, relève Paul Kennedy dans son essai Préparer le XXI siècle.

Le dernier vestige de la guerre froide

Entre la République de Corée (Sud) et la République démocratique et populaire de la Corée il y a la Zone Démilitarisé qui sépare les deux pays. Toute est parti de la guerre déclenchée en 1950 contre la Corée du Sud sur ordre du président Kim IL Sung. L’intervention américaine du côté de la Corée du Sud va mettre en déroute l’armée nord-coréenne qui aura la vie sauve par l’intervention de l’armée chinoise. Le 27 juillet 1953, une amnistie est signée pour mettre fin à la guerre. Ainsi une  Zone Démilitarisée de 4 Km de large et de 241 Km de long qui sépare les deux Corées (Nord et Sud) au 38° parallèle.

[Freddy Mulumba/lePotentiel]

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