samedi , 7 novembre 2020
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Joseph Kasa-Vubu, Baudouin, Patrice Emery Lumumba (milieu)

RDC : Les racines de la crise actuelle

Depuis le 30 juin 1960, la RDC est en proie à des crises  politiques et institutionnelles récurrentes qui débouchent souvent sur des conflits violents et qui, à leur tour, provoquent le délitement de l’autorité de l’Etat et de l’Etat lui-même. Pour résoudre les différends entre protagonistes, on a eu recours jusqu’à présent à la pratique des négociations politiques dans le cadre des conclaves politiques ou des conférences résolutoires. La résurgence des mêmes conflits après accords, et ce, malgré les engagements pris par les uns et les autres, amène à s’interroger sur la pertinence d’une telle approche et sur la viabilité de solutions qui en découlent. La crise congolaise en cours est une controverse politique dont les racines procèdent inéluctablement des erreurs électorales de 2011 reconnues par tous et de la Gouvernance unilatérale, arrogante et sans contrition, de la part de la Majorité présidentielle.

La controverse politique en cours en RD Congo procède inéluctablement des erreurs électorales de 2011 reconnues par tous et de la gouvernance unilatérale, arrogante et sans contrition, de la part de la Majorité présidentielle.

La victoire électorale dans les vieilles démocraties n’a jamais été en soi un permis de libre conduite. Elle sert principalement à clarifier les responsabilités et les règles du jeu démocratique. Elle n’exclut cependant pas la collaboration entre les forces antagonistes d’hier au profit de l’intérêt général commun. Au demeurant, la démocratie véritable dépasse généralement le moment électoral.

Le dialogue ne constituant pas une nouvelle élection pour conférer à qui que ce soit une nouvelle légitimité, il est important qu’à son issue, les fils et filles du Congo adoptent une solution consensuelle à la crise. Sa conclusion positive et utile devra culminer en l’établissement d’un Accord politique contraignant, pour tous, sur l’irréversibilité de la démocratie électorale en RD Congo, le respect de la Constitution et du principe de l’alternance démocratique au pouvoir ainsi que la poursuite du processus en panne.

ETAT DE LA QUESTION

Depuis le 30 juin 1960, la RD Congo est en proie à des crises  politiques et institutionnelles récurrentes qui débouchent souvent sur des conflits violents et qui, à leur tour, provoquent le délitement de l’autorité de l’Etat et de l’Etat lui-même. Pour résoudre les différends entre protagonistes, on a eu recours jusqu’à présent à la pratique des négociations politiques dans le cadre des conclaves politiques ou des conférences résolutoires. La résurgence des mêmes conflits après accords, et ce, malgré les engagements pris par les uns et les autres, amène à s’interroger sur la pertinence d’une telle approche et sur la viabilité de solutions qui en découlent.

La crise congolaise en cours est une controverse politique dont les racines procèdent inéluctablement des erreurs électorales de 2011 reconnues par tous et de la Gouvernance unilatérale, arrogante et sans contrition, de la part de la Majorité présidentielle.

En effet, partout au monde, la victoire électorale n’a jamais été en soi un permis de libre conduite. Elle a toujours servi à la clarification des responsabilités et des règles du jeu démocratique ; ce qui n’exclut pas la collaboration entre les forces antagonistes d’hier au profit de l’intérêt général commun. La démocratie véritable dépasse généralement le moment électoral. Les exemples sont légion en France et ailleurs où des personnalités de l’opposition ont été rapprochées et responsabilisées par la Majorité au pouvoir, sans que cette dernière perdre pour autant la face.

Ceci n’a pas été le cas en RD Congo après 2011, malgré la main tendue de l’Autorité morale de la Majorité à collaborer avec les autres, notamment de l’Opposition.

En lieu et place de cette ouverture d’esprit, les faucons ont usé de l’arrogance, de l’égoïsme et des anciennes pratiques de débauchage sans résultats probants. Les points d’achoppement officiellement vantés cachent donc la frustration d’une Opposition minoritaire, humiliée et ridiculisée tout au long de la législature ; alors que le principe démocratique reconnait la loi de la Majorité avec la protection de la minorité.

Les crises récurrentes en RD Congo, depuis son accession à la souveraineté internationale, exigent donc une réflexion profonde et prospective sur leurs véritables enjeux et les approches de leur résolution. Elles appellent un regard interrogateur sur les fondements et les ressorts de la démocratie libérale électorale dans un « failed state (Etat faible) », multiethnique ainsi que des propositions alternatives courageuses de sortie de crise. Il est aussi évident qu’en se posant chaque fois de fausses questions sur la réalité des crises politiques récurrentes dans leur pays, les Congolais y donneront toujours de fausses réponses ; donc des fausses solutions – raison pour laquelle elles deviennent récurrentes.

SOLUTION CONTEXTUELLE REALISTE DE SORTIE DE CRISE

Notre attention a été attirée par la contradiction tendancieuse entre les principes conducteurs du dialogue levés par le Comité préparatoire et les éléments de l’agenda de cette rencontre de la dernière chance. En effet, les points a et d, spécifiquement le respect de la constitution et des lois de la République ainsi que la mise en œuvre de la résolution 2277 du Conseil de sécurité de l’ONU, tout autant que les valeurs démocratiques énoncées dont entre autres, l’alternance démocratique résultant des élections, ne sont pas traduits en activités de l’agenda du dialogue.

Il me semble que ces points constituent les vrais sujets de la controverse actuelle en RD Congo. S’ils ne sont pas inscrits à l’ordre du jour, il est fort possible que les Congolais répondent à des fausses questions ou à des questions secondaires, à caractère technique, et laissent sciemment de côté les enjeux de la crise en cours comme de coutume.

Or, la crise en cours étant éminemment politique, sa solution devra être opportunément politique. A moins que le sujet relatif à l’Accord politique et à sa mise en œuvre suggère une négociation sérieuse, objective et rationnelle sur les véritables sujets de controverse dont question aux points a et d, sinon nous nous retrouverons à la case de départ.

Concrètement, au vue de la nécessité affirmée d’un dialogue politique national et inclusif, dans le souci d’améliorer le processus électoral, de régler les contradictions en résultant et de prévenir les crises politiques pouvant en découler, la réussite de ce forum devra passer par le respect et la traduction en activités, des principes conducteurs adoptés par le comité préparatoire. Etant donné que le dialogue ne constitue pas en soi une nouvelle élection pouvant conférer une nouvelle légitimité, il est important qu’à son issue, les fils et filles du Congo adoptent une solution consensuelle à la crise. La victoire d’un camp sur l’autre sera un retour en arrière et produira certainement une nouvelle vague de contestations, à l’instar de celles d’après les élections de 2011.

Sa conclusion positive et utile devra culminer en l’établissement d’un Accord politique contraignant, pour tous, sur l’irréversibilité de la démocratie électorale en RD Congo, le respect du principe d’alternance démocratique au pouvoir et la poursuite du processus en panne.

Dans cette perspective, l’Accord politique du dialogue devra intégrer le dépassement du moment électoral en vue de l’instauration de la consociativité politique en RD Congo, comme mode de gouvernance.

Cette option majeure, une fois levée, aura pour objectifs principaux:

a. Consolider la paix et la cohésion nationale,

b. Eviter les frustrations électorales nuisibles,

c. Promouvoir le progrès social réel et partagé,

d. Rétablir l’équité au sein de la nation,

e. Instaurer dans les mœurs politiques les principes de redevabilité et bonne gouvernance,

f. Affirmer la primauté de la loi et du règlement,

g. Renforcer l’Etat de droit et réhabiliter l’Etat congolais comme tel.

Pour éviter de retomber dans les erreurs des forums antérieurs, des engagements formels doivent être pris, attestés et certifiés par tous, et par les accompagnateurs sur les points suivants:

a. Non éligibilité des autorités d’une transition éventuelle,

b. Respect des dispositions intangibles de la constitution et de délais,

c. Acceptation du principe d’alternance démocratique issue des élections démocratiques,

d. Accord formel sur un calendrier électoral consensuel et sur la séquence du processus électoral,

e. Etablissement d’un Graphe PERT (Program Evaluation Review Technique) consensuel et de son Chemin critique (CPM) pour aider à l’exécution et à l’achèvement effectif  du cycle électoral en cours,

f. Mise en place d’un Mécanisme National d’Application des Résolutions du dialogue doté d’un lot de pouvoirs régaliens et de supervision du Graphe dont question ci-dessus.

La perspective inéluctable et utile dudit dialogue, dans la formulation qui se dessine, est à mes yeux la structuration institutionnelle transitoire, basée sur un consensus optimal. Les coudées franches qu’il va octroyer aux institutions représentatives de transition procèdera du fait qu’une légitimité contextuelle factice leur sera conférée consensuellement par la classe politique.

Penser, résoudre une crise politique par la voie du droit et de la justice, en se référant aux articles de la constitution et aux avis de la Cour constitutionnelle, éluderait la nature politique de cette crise. La voie constitutionnelle avantagera un groupe de protagonistes au détriment des autres.

Les autorités institutionnelles actuelles peuvent utilement saisir l’occasion du dialogue pour conduire le pays transitoirement vers la paix, la cohésion et la tenue effective des élections, en acceptant les principes suivants:

a. Durant la transition, plus personne n’exercera le mandat de plein exercice,

b. Partage de compétences et responsabilités régaliennes entre l’Organe d’application des résolutions du dialogue et les institutions garantes de la stabilité du pays, comme gage de succès,

c. Suspension des institutions nationales et provinciales issues des élections de 2011. Le président de la Chambre des sages (Chambre haute) pourrait être converti, pour les besoins de la cause, en coordonnateur national du CNARD (Comité National d’Application des Résolutions du Dialogue). Il peut être aussi remplacé par un homme d’Etat intègre, patriote et consensuel,  en vue de partir sur des nouvelles bases avec égalité de chance entre protagonistes,

d. Transfert des responsabilités électorales au gouvernement des technocrates non partants pour restaurer le crédit perdu par la CENI et rétablir la confiance entre protagonistes,

e. Elaboration du statut des anciens chefs de corps constitués de la République comme garantie politique et juridique de leur inviolabilité et institution en leur faveur d’un régime particulier de sécurité sociale.

Quiconque ne prendrait pas en considération l’environnement politique actuel, caractérisé par l’aspiration du peuple congolais à la démocratie qui  se fonde sur les valeurs telles: l’alternance au pouvoir, la diversité d’opinions, le respect des droits humains et des libertés, la séparation des pouvoirs, l’objectivité, la rationalité, la justice distributive et la justice tout court, se cassera la figure, s’il s’obstine à imposer, coûte que coûte, un schéma unique. Un bon stratège politique doit recouvrir plusieurs hypothèses de travail et des plans diversifiés d’action. Procéder autrement, c’est ouvrir une voie royale à la contestation.

[Ir 2K.T, Analyste politique indépendant]

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